La saison cyclonique commence à peine à Haïti, plus d’une vingtaine de morts sont à déplorer dans la seule région métropole de Port-au-Prince. Un test redoutable pour Michel Martelly, qui a accédé à la magistrature suprême mi-mai. Reportage à La Vallée de Bourdon, un bidonville accroché à l’une des montagnes qui surplombent la capitale haïtienne.

L’entrée principale de La Vallée de Bourdon ne semble pas plus large que la porte d’une tente. Le dédale fait tantôt d’escaliers en béton, tantôt de sacs de terre, débouche sur une vraie vallée comme l’indique le nom de ce bidonville accroché à l’une des montagnes qui surplombent Port-au-Prince.

Plus on descend les pentes raides, plus les dégâts causés par les quatre jours de pluies diluviennes qui se sont abattues sur la région métropolitaine saute aux yeux. « Nous avons connu des nuits d’enfer. Nous veillons constamment, toutes les nuits, pour éviter les pertes en vies humaines », explique Jilnor Bien-Aimé.

Ecoutez-le :

Inquiété par une probable nouvelle nuit de pluie, ce père de cinq enfants n’a pas oublié son métier de menuisier. Décamètre à l’appui, il mesure les hauteurs atteintes pour la trombe d’eau. « L’eau a atteint jusqu’à trois mètres avant de sortir de son lit », soupire Madame Jean-Baptiste, sa voisine.

Cette habitante a lutté pendant des heures face aux fureurs des eaux de la ravine qui traverse la vallée, pour sauver ses deux enfants. « Malheureusement, se désole-t-elle, je ne pouvais pas empêcher les quelques meubles et les archives de la famille de finir dans la boue. »

Ecoutez son témoignage :

Les dernières averses ont provoqué l’effondrement de plusieurs maisons dans La Vallée de Bourdon et laissé des tonnes de boues aux pieds et dans les maisons construites à quelques mètres du lit de la ravine.

Marie-Rose Guerrier croyait avoir vécu la pire journée de sa vie après le violent séisme du 12 janvier 2010 qui a secoué le département de l’Ouest. « La maison fissurée sous la pression de Goudou-Goudou est finalement emportée par les eaux de la ravine », se désole la dame, les bras ouvertes à l’image de la statue de Sacré-Cœur.

Quand le désespoir s’empare des victimes, il ne reste que Michel Martelly, le nouveau chef de l’Etat, à solliciter. « Nous n’avons nulle part ou aller », s’époumonent un groupe de riverains. Ces derniers pressent le gouvernement d’agir vite afin de les reloger dans un autre site, car la saison cyclonique devrait durer jusqu’à novembre prochain.

« Je souhaite une intervention du président Martelly pour faire ériger des gabions aux alentours de la ravine pour éviter de nouvelles inondations », lance Jilnord Bien-Aimé, qui n’est pas prêt à tourner le dos à son quartier, où il réside depuis quinze ans.

En attendant d’honorer sa promesse de fournir des abris solides aux réfugiés, le chef de l’Etat n’hésite pas à prêter ses paires de bottes pour aider ses voisins du quartier de Péguy-Ville, qui font face à la saison cyclonique. Il demande aussi à la presse d’être plus responsable en incitant les habitants à cesser de construire près des lits des rivières.

 

Claude Gilles (www.lenouvelliste.com)

Stanley Jean-Pierre (www.tnh.ht)

Eddy Jazil (www.metropolehaiti.com)